manifeste pour une dignité en acte

Manifeste fondateur du Collectif.


Le non abandon : une affirmation de vie

Il nous faut repenser ensemble les exigences indispensables à une vie en société qui soit digne d’être vécue jusqu’à son terme.
Nous affirmons que la dignité et les droits des personnes malades ou handicapées, valent mieux que les controverses portant sur l’administration de leur mort. Plus vulnérable que d’autres, nos obligations à leur égard sont les plus fortes.
La signification des combats que les personnes malades et leurs proches mènent au quotidien afin de préserver une existence humaine digne, justifie des solidarités concrètes qui ne peuvent se comprendre qu’au service de leur vie.
On ne saurait ramener à des positions idéologiques, l’argumentation de décisions souvent complexes et toujours singulières dans les circonstances les plus extrêmes de la mort médicalisée. L’approche de la mort touche au plus intime. Le devoir de respect impose la décence et la retenue.Les professionnels de santé ne sauraient accepter la mission d’exécuter, à la demande, l’acte de mise à mort. Leur vocation les engage à témoigner sollicitude, considération et respect à la personne malade, privilégiant une relation de confiance dans la continuité et la mesure d’un soin concerté. Leur engagement auprès de personnes que la maladie ou les handicaps confinent trop souvent dans les espaces oubliés de la société, est l’expression d’une solidarité humaine et d’une faculté de contrer l’individualisme. Il s’avère à ce point remarquable qu’il convient d’en reconnaître la valeur sociale afin de ne pas laisser dénigrer sa signification.Les personnes malades, leurs proches, les professionnels et membres d’associations mobilisés auprès des plus fragiles, au nom de la cité, doivent bénéficier des moyens qui leur permettent de résister aux logiques du renoncement, à la hiérarchie de certains choix médicaux, comptables ou simplement utilitaristes, à la désertion des relais d’opinion pourtant attendus dans ce combat.
Le non abandon est une affirmation de vie opposée aux pratiques déraisonnables.

La sollicitude : une affirmation de solidarité

On ne saurait dévoyer l’engagement exceptionnel qui a permis au cours des dernières années de mieux comprendre et respecter le droit des personnes malades ou handicapées, leurs aspirations à une qualité d’existence, à une intégration dans la société et à des soins adaptés à leurs choix profonds. On ne saurait accepter les logiques de l’évitement, de l’indifférence ou du renoncement, qui tentent de justifier par des positions irrecevables la relégation de nos malades aux marges de la cité, dans un état de précarité et d’errance chroniques, au domicile ou dans des institutions vécues comme des lieux de ségrégation. La délivrance anticipée d’une vie à ce point indigne de la vie, leur semble alors préférable à l’expérience quotidienne d’une forme subreptice, anonyme, indifférenciée d’euthanasie sociale.
Les valeurs de la démocratie sont en cause lorsque la liberté, l’égalité, la dignité et les droits essentiels de la personne ne sont pas respectés. La sollicitude témoignée à la personne jusqu’à sa mort est l’affirmation d’une solidarité qu’on lui doit.

Nous en appelons à une mobilisation éthique

Il nous faut refuser la marginalisation morale qui aboutit à ne plus savoir se soucier des plus faibles qu’en se préoccupant des conditions de leur mort.
Nos obligations à leur égard défient les clivages politiques et contestent les postures intellectuelles avant tout soucieuses d’un individualisme forcené au mépris des sans liens, des sans voix, des sans lieu, et parfois des sans vies dont on néglige l’existence.
A la compassion accordée aux « vies indignes d’êtres vécues » devraient répondre sans attendre des choix politiques attentifs à mettre en œuvre des conditions de « vie digne d’être vécue ». C’est dans l’action et non dans la commisération que nos responsabilités sont engagées.

Nous en appelons à une mobilisation éthique qui nous permette, ensemble, de refonder dans l’action, au plus près des réalités humaines que la société méconnait, évite ou refuse, une dynamique de la solidarité et de la dignité en acte.

 

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