Extension de la loi Belge relative à l’euthanasie aux mineurs et aux personnes atteintes d’une affection cérébrale incurable. Quatre nouvelles propositions de loi

Au moment où la France semble s’apprêter à une évolution législative relative aux conditions d’assistance médicalisée en fin de vie, le Sénat de Belgique souhaite pour ce qui le concerne une révision de sa loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie. Il propose des dispositifs tirés de l’expérience acquise en plus de dix années (précision sur la clause de conscience et le respect des droits de la personne), et plus encore une extension de l’indication d’euthanasie aux mineurs et aux personnes atteintes d’une affection neurologique incurable.
Les propositions des 26 juin et 3 juillet 2013 concernent les ‘critères de minutie’ qui semblaient à certains par trop contraignants au regard d’une demande probablement encore trop contrainte.
On le constatera, les questions si discutées en France de sédation dite terminale ou de suicide médicalement assisté ne préoccupent guère les parlementaires Belges : ils semblent avoir dépassé semblables arguties.
Une proposition de loi 5-179/1 modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie en ce qui concerne les mineurs âgés de quinze ans ou plus, avait été déjà déposée devant le Sénat Belge le 23 septembre 2010. Sa présentation avait suscité de la part d’un Sénateur cette remarquable affirmation : « Nous pensons depuis toujours que les lois éthiques sont des lois biodégradables ! Notre société évolue et la réflexion doit donc évoluer aussi ».
Il paraît désormais important de ne pas négliger les avancées ainsi produites par ce ‘modèle’ Belge si souvent invoqué pour justifier la législation dans notre pays. Elles incitent à s’interroger sur la nature des prochaines adaptations qui seraient encore apportées à la loi Belge pour viser à encore plus d’efficience !

Les propositions de loi
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Proposition de loi modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie en vue de l’étendre aux mineurs, Sénat de Belgique, 26 juin 2013

Extraits
« Instruits de l’expérience de l’application de la loi de 2002 concernant les personnes juridiquement capables, plusieurs médecins concernés sont venus plaider pour que le législateur intervienne afin de poser les conditions suivant lesquelles l’euthanasie d’un mineur deviendrait possible.
L’euthanasie est définie par la loi, reprenant la définition proposée à l’époque par le Comité de bioéthique, comme étant « l’acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci ».
L’euthanasie est donc un acte répondant à la demande de la personne concernée.
Pour exprimer valablement cette demande, il faut être capable d’en juger raisonnablement.
Selon la définition légale des auteurs de la proposition, l’euthanasie ne concerne que les mineurs disposant de la capacité de discernement. Pour rappel, la capacité de discernement n’est pas un état absolu dont disposerait une personne à partir d’un certain âge et pour le reste de sa vie, pour toute situation vécue. Elle est évaluée pour chaque individu, face à une situation particulière. Elle doit être attestée pour chaque question nouvelle.
Mais par ailleurs, un mineur non émancipé n’a pas la capacité juridique. C’est donc ses représentants légaux (parents ayant autorité parentale, tuteur, …) qui agissent par représentation pour poser des actes juridiques. En conséquence, l’intervention des représentants légaux est nécessaire pour pouvoir pratiquer une euthanasie sur un mineur.
La présente proposition vise donc à autoriser la pratique de l’euthanasie, dans les conditions déjà fixées par la loi de 2002, sur un mineur dont la capacité de discernement est attestée et dont la demande, émise dans les conditions de la loi, est confirmée par ses représentants légaux.
L’évaluation de la capacité de discernement devra être réalisée par un pédopsychiatre ou un psychologue, qui attestera que le mineur est à même d’apprécier raisonnablement les conséquences de sa demande.
Le discernement ne peut pas être déduit simplement de l’âge de l’enfant. Les personnes auditionnées admettent que la capacité de discernement est variable d’un individu à l’autre, d’une situation à l’autre.
Tous les spécialistes pédiatriques entendus ont insisté sur l’extraordinaire maturité que des enfants peuvent acquérir quand ils font face à une maladie létale. Des mêmes personnes auditionnées, il ressort qu’il est préférable de ne pas tracer de limite d’âge arbitraire, mais de se fonder sur la réponse à la question : la demande du patient est-elle éclairée, est-il en capacité d’en apprécier toutes les conséquences ? »

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Proposition de loi modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie et la loi coordonnée du 10 juillet 2008 relative aux hôpitaux et à d’autres établissements de soins, en vue de garantir le respect de la clause de conscience, Sénat de Belgique, 26 juin 2013

Extraits
« Art. 2 – L’article 14, alinéa 3, de la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie est complété par les phrases suivantes : « Aucun médecin ne peut être empêché de pratiquer une euthanasie en vertu d’une convention. Le cas échéant, une telle clause d’interdiction est réputée non écrite. »

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Proposition de loi modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie, en vue de fixer un délai à respecter par le médecin, d’une part, pour répondre à la demande d’euthanasie du patient et, d’autre part, pour transmettre le dossier médical du patient à une commission au cas où il refuserait d’accéder à la demande de celui-ci, Sénat de Belgique, 26 juin 2013

Extraits
« La présente proposition entend donc clarifier la procédure en ce qui concerne la réponse à apporter à la demande du patient. Elle modifie l’article 14 de la loi du 28 mai 2002 en précisant que le refus de pratiquer une euthanasie doit, le cas échéant, être communiqué par le médecin au patient dans les sept jours de la formulation de la demande.
De même, le dossier médical doit être communiqué à un autre médecin qui accédera à la demande du patient. Le présent texte propose que cette communication se fasse dans un nouveau délai de quatre jours maximum. »

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Proposition de loi modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie en vue de l’étendre aux personnes atteintes d’une affection cérébrale incurable à un stade avancé et irréversible et qui ont exprimé leurs volontés dans une déclaration anticipée d’euthanasie, Sénat de Belgique, 3 juillet 2013

Extraits
« Cette extension du champ d’application de la loi « euthanasie » aux malades atteints d’une maladie cérébrale irréversible et ayant rédigé une déclaration anticipée est animée par quatre mots clés : autonomie, liberté, dignité, et responsabilité. Des hommes et des femmes attendent que l’on leur permette d’accéder à leur demande d’euthanasie en fixant des balises claires qui définissent avec précision l’importance du rôle du patient, des proches et de l’équipe médicale. De quel droit ignorer ces situations de souffrances ? De quel droit leur refuser de mourir en toute dignité dans le respect de leurs dernières volontés ?
Pourquoi refuser d’encadrer soigneusement la réponse à des demandes d’euthanasie de ce type qui existent qu’on le veuille ou non ? Les auteurs ne veulent plus de ce vide juridique.
C’est d’ailleurs d’autant plus utile que cela évite aux médecins eux-mêmes de prendre d’énormes risques parce que, rappelons, sans respect des prescriptions légales, l’euthanasie est un meurtre. »

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Textes dans leur intégralité :

Mineurs

Propositions de délais

Clause de conscience

Affection cérébrale

 

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