Plusieurs observations à propos de « Quelques heures de printemps »

 Marcela Gargiulo
Psychologue clinicienne, Institut de Myologie et Département de Génétique, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, AP-HP, AP-HP, MCU université Paris Descartes, Laboratoire de Psychologie Clinique et Psychopathologie

Alexandra Durr
Docteur en neurogénétique, Centre de référence,  département de génétique, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, AP-HP

Martine Frischmann
Psychologue clinicienne, ancienne psychologue conseil AFM)

Rebeca Majter
Psychanalyste, coordinatrice d’une association pour les personnes dépendantes et handicapées

Nous souhaiterions présenter quelques réflexions à propos du film de Stéphane Brizé.

Nous n’aimerions pas que certaines personnes fragilisées par la maladie puissent croire  que le suicide assisté est un moyen de libérer une parole ou constituer une issue possible pour régler ce qui n’a pas pu se faire tout au long d’une vie.

Le film met en évidence une relation mère-fils extrêmement complexe mais dont les sources profondes de la haine entre les personnages, la honte éprouvée, les conflits anciens toujours présents, ne sont pas suffisamment approfondies. En particulier,  tout ce qui conduit à une femme atteinte d’un cancer à se déterminer pour cette solution finale sans lutte ni débat intérieur.

 

La protagoniste (très bien interprétée), terrorisée par la vie et non par la mort,  n’a pas fait le choix du suicide assisté. Elle est condamnée à le faire par sa souffrance psychique dont même pas son médecin n’a pu prendre la mesure. Le médecin est, de notre point de vue,  dans une certaine forme de lâcheté, comme bien d’autres personnages du film qui ne se questionnent pas ni la questionnent sur son choix. Ils laissent « la chose » se faire dans une forme de passivité mélancolisante.

 

Cela devrait nous conduire à penser que certains processus psychiques  chez les sujets peuvent les amener à des résolutions irréversibles concernant leurs traitements, l’arrêt des traitements et de positionnements radicaux sur leur fin de vie  qui pourraient être modifiés lorsqu’un tiers intervient et s’engage dans la relation.
Notre expérience quotidienne auprès des patients nous apprend beaucoup sur la composante narrative de toute décision. Il est de notre responsabilité non seulement de soutenir le choix du patient mais surtout de lui apporter l’aide nécessaire lorsque son état psychologique le contraint à prendre une décision fondée sur une souffrance psychique qui n’a pas pu trouver l’accueil nécessaire à une reformulation.

 

2 comments to Plusieurs observations à propos de « Quelques heures de printemps »

  • BOUCHER

    J’ai vu le film qui pose, selon mes perception et compréhension, avec beaucoup de pudeur et sans parti pris, le sujet du droit à décider de la façon de quitter la vie.
    Je constate à quel point ceux et celles que cela dérange vont toujours chercher toutes sortes de problématiques qui seraient à l’origine du choix de mettre un terme à sa vie de façon délibérée et assumée.
    Quand, ces mêmes personnes, médecins, psychologues et autres « notables », oui, quand se poseront-ils la question de la violence faite aux bébés pour lesquels, en grande proportion, l’on décide de l’heure de sa venue au monde pour le simple confort des parents et des médecins : naissance aux jours et heures ouvrables…
    Cela ne vous pose aucun problème en début de vie lors même que le bébé n’a pas son mot à dire mais en souffre peut-être énormément.
    Alors, pourquoi empécher, culpabiliser une personne adulte, mature, qui, en conscience, certes plus ou moins éclairée, décide de ses jour et heure pour tirer sa révérence parce que lassitude, parce que maladie, douleurs physiques et psychiques si dégradation corporelle, parce que solitude…
    Je trouve malhonête, malvenu que tous ces messieurs et dames bien-pensants, mais surtout pensant à la place des autres, ne se préoccupent du bien-fondé de la fin de vie volontaire qu’au moment de la fin de vie des humains.
    Que n’ont-ils réfléchi et favorisé plus tôt une société conviviale, une société du partage, une société du côtoiement entre générations, une société de l’Etre et non de l’avoir !!!
    Sans parler des églises qui s’octroient le droit de dicter la conduite des non-croyants au nom de je ne sais quel respect de la vie.
    Au lieu de vous préoccuper trop arbitrairement de la façon dont quelques un(e)s veulent décider de leur fin de vie, dépéchez-vous de vous préoccuper de la qualité de vie de la majorité de la population de la naissance au « grand-âge. Cela vous octroierait quelque droit à influencer notre réflexion.

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