Approches de la fin de vie et de l’euthanasie en Europe

Note réalisée par le Collectif Plus Digne la Vie avec le Groupe de travail « Éthique, droit et santé ».


Quels sont les États européens qui ont légalisé l’euthanasie ?

Les Pays-Bas en 2001, la Belgique en 2002 et le Luxembourg en 2009. Ces trois pays représentent 27,7 millions d’habitants sur 500 millions d’habitants dans les États membres de l’Union européenne.

 

De plus en plus d’États légalisent-ils l’euthanasie ?

Non, c’est le phénomène inverse que l’on observe. À l’échelle du monde on  constate que les tentatives pour légaliser l’euthanasie ont échoué ces dernières années : dans l’État du Maine  en 2000, en Écosse en 2009, dans l’État du New Hampshire en janvier 2010, au Canada en avril 2010, en Australie du Sud en novembre 2010, en Israël en janvier 2011.

L’exemple Suisse

Saisi de demandes pour assouplir l’encadrement du suicide assisté, le Conseil fédéral suisse n’a pas changé la législation en 2011 pour deux motifs. À la fois pour ne pas créer d’effet incitatif au suicide en donnant un statut légal aux organisations d’assistance au suicide et en raison de  l’hostilité du corps médical qui ne voulait pas que l’assistance au suicide devienne une activité médicale  Le gouvernement suisse en est resté au statu quo en plaidant pour une promotion de la prévention du suicide et de la médecine palliative (Département fédéral de la justice et de la police, communiqué du 29 juin 2011).

Observe-t-on des dérives dans les États ayant légalisé l’euthanasie ?

Oui, en Belgique.

• La volonté des personnes n’est pas respectée. Des études très récentes parues dans une revue médicale canadienne (journal de la Canadian Medical Association), ont mis en lumière des dérives notables sur ce plan dans les pratiques belges. Sur un échantillon de 208 personnes décédées à la suite d’une injection létale, 32 % n’avaient pas exprimé explicitement le souhait d’être euthanasiées.

• Des nouveaux nés ont été euthanasiés, selon une publication scientifique belge, bien évidemment sans leur consentement. Une dépêche de l’AFP de mars 2009 révèle que vingt-six mineurs ont été activement euthanasiés au cours des deux dernières années en Belgique, par l’administration de drogues létales. Il s’agit d’une enquête publiée dans l’American Journal of Critical Care, portant sur les pratiques professionnelles de cent quarante et une infirmières et infirmiers affectés dans cinq des sept unités des soins intensifs pédiatriques du pays.

Beaucoup d’euthanasies sont pratiquées non pas par des médecins mais par des infirmières. Une étude  parue dans le journal de la Canadian Medical Association révèle en 2009 que dans 12 % des cas des euthanasies légales et 50 % des euthanasies sans la demande expresse du patient,  les injections létales ont été administrées par des infirmières et non par des médecins. Elle conclut que ces infirmières ont exercé illégalement ces tâches.

Oui, aux Pays-Bas.

• Un taux élevé de pratiques clandestines. D’après les dernières estimations disponibles, le taux de signalement  des euthanasies aux Pays-Bas était estimé en 2005 à 80 %. Cela signifie un taux d’euthanasies clandestines de 20 % en 2005, ce qui fragilise les vertus de transparence prêtées à cette législation par ses promoteurs.

• L’extension du champ légal de l’euthanasie : d’abord au critère psychiatrique. En 1994 un psychiatre avait été condamné pour avoir aidé un patient à se suicider

En 2011 la Société royale de médecine considère que la loi comprend des dispositions permettant le suicide assisté chez des patients souffrant de troubles psychiatriques et de démence. Alors que la loi parle de souffrances insupportables et sans perspectives d’amélioration.

La même Société royale de médecine considère que « ces souffrances  peuvent résulter d’une combinaison de facteurs sociaux, médicaux et alimentaires ».

L’obligation faite au médecin refusant l’euthanasie d’aiguiller le malade vers un confrère qui la pratique. Ce n’est pas une obligation légale mais une obligation morale et professionnelle pour la Société royale de médecine.

• Des inquiétudes exprimées par l’ONU. Lors de sa 96ème session, qui s’est tenue à Genève du 13 au 31 juillet 2009, le Comité des droits de l’Homme de l’ONU a mis en garde les Pays-Bas pour son « taux élevé de cas d’euthanasie et de suicide assisté ».

Les membres du Comité se sont notamment inquiétés du fait que :

- « la loi permette à un médecin d’autoriser de mettre fin à la vie d’un patient sans recourir à l’avis d’un juge » ;

- « le deuxième avis médical requis puisse être obtenu au travers d’une ligne téléphonique d’urgence. »

 

Des personnes âgées hollandaises sont-elles amenées à quitter leur pays de peur d’être euthanasiées ?

Un établissement de séjour et de soins doit être construit dans le quartier de Suderwick à Bocholt en Rhénanie du Nord Westphalie. C’est ce qu’a rapporté le journal  Die Rheinische Post en 2003. Ce projet pilote répond au souhait de beaucoup de hollandais qui veulent passer leur fin de vie en sécurité. La peur d’être victimes de la nouvelle loi sur l’euthanasie est grande. De plus en plus de personnes âgées hollandaises cherchent des spécialistes allemands a indiqué Inge Kunz de l’Association Omega–vivre avec la mort, à Bocholt. Elles ont perdu confiance dans leurs médecins. (« Les personnes âgées hollandaises fuient en Allemagne », 4 février 2003, Bocholt www.kath.net)

Des États européens ont-ils la même conception de l’accompagnement de la fin de vie que la France à travers la loi « Leonetti » ?

Oui, on citera deux Etats d’importance, l’Allemagne et l’Espagne.

 

L’Allemagne

D’une part, l’homicide du patient est pénalement susceptible d’être sanctionné même s’il a lieu à la demande du patient. La participation du médecin au suicide n’est pas un acte médical. À l’occasion de son Congrès annuel le 25 juin 2011, la Chambre fédérale des médecins a adopté à une très large majorité une disposition dans le code de déontologie qui interdit aux médecins de tuer les patients à leur demande et de pratiquer le suicide assisté (Article 16, Assistance aux mourants). Cette disposition est donc identique à l’article 38 du code français de déontologie médicale (Article R 4127-38, code de la santé publique).

D’autre part, les obligations médicales sont les mêmes  qu’en France : pas d’acharnement thérapeutique et recours aux soins palliatifs. Pour les mourants – malades ou blessés atteints d’une défaillance irréversible d’une ou de plusieurs fonctions vitales entraînant un décès prévisible à brève échéance -, le médecin doit intervenir pour assurer une mort digne aux mourants. Cette aide passe par la médecine palliative, l’assistance et la fourniture des soins de base. Pour les patients qui ne sont pas encore mourants mais qui en l’état des connaissances médicales mourront de manière prévisible dans un proche avenir, un changement des objectifs du traitement est possible si des mesures ayant pour objet de maintenir la vie ne font que prolonger les souffrances ou si le changement de traitement correspond à la volonté du patient. (Journal allemand des médecins, 108, Cahier 7, 10 février 2011).

Quelle est la position des médecins allemands sur l’euthanasie ?

30 % des médecins interrogés étaient pour, 62 % contre et 8 % étaient indécis (Résultats d’une enquête représentative menée auprès de médecins hospitaliers et libéraux par l’Institut pour la démoscopie Allensbach en juillet 2010).

 

L’Espagne

On retrouve une même inspiration que celle de la loi Leonetti et de la loi allemande dans la rédaction de l’article 17 du projet de loi espagnol sur les « droits de la personne avant la mort » déposé par le gouvernement de Jose Luis Zapatero le 11 juin 2011 devant la Chambre des députés espagnole.

Il définit les critères des décisions d’arrêt de traitement. Le diagnostic du médecin doit être basé sur un jugement clinique appuyé sur des preuves scientifiques disponibles, sur ses connaissances professionnelles, son expérience, la gravité de l’état du patient et son pronostic. Le personnel soignant adapte l’effort thérapeutique en le proportionnant à l’état du patient, en évitant l’adoption ou le maintien d’interventions et de mesures de soutien de vie sans utilité clinique, en rapport avec la durée et la qualité de sa vie future et en veillant toujours à le soigner et à assurer son bien-être. (Proyecto de Ley reguladora de los derechos de la persona ante el proceso final de la vida (121/000132). Presentado el 11/06/2011, calificado el 14/06/2011).

 

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