Quelques résultats tirés de l’enquête nationale DemandE diffusés aux centres sollicités et concernant les demandes de mort anticipées en soins palliatifs.

Edouard FERRAND

Coordinateur du projet, pour le groupe DemandE

10 octobre 2011

 

L’article relatif à l’enquête nationale DemandE sur les demandes de mort anticipées exprimées auprès des équipes de soins palliatifs en 2010 en France (*) sera disponible sur Internet dès la fin du mois d’octobre 2011.

Nous remercions encore une fois les nombreuses équipes, la SFAP et la FNEHAD qui nous ont permis d’aboutir à ce résultat, moins d’un an après le lancement de l’étude.

 

Pour la première fois en France, des données objectives permettent de cerner au plus près la problématique de la demande de mort anticipée (DeMA) et la réalité des pratiques.

Vous avez ci−dessous la primeur des principaux résultats; ils nous paraissent importants à diffuser et à débattre.

Pour mémoire, il s’agissait d’une enquête transversale menée entre novembre 2010 et février 2011 auprès de 789 structures françaises de soins palliatifs : Equipes Mobiles d’accompagnement et de Soins Palliatifs (EMASP), Unité de Soins Palliatifs (USP), Lits Identifiés en Soins Palliatifs (LISP), Réseaux de santé, Hospitalisation à Domicile (HAD).

 

Nous avions défini la DeMA comme:

‐  La demande explicite du patient à un professionnel de santé du service où il est hospitalisé, d’une aide pour une mort anticipée ;

-  Le souhait explicite du patient de ne plus vivre parce qu’il considère cette modalité de vie comme insupportable, et/ou que sa vie  a été accomplie et/ou que sa vie est arrivée à son terme ;

‐  Le souhait anticipé du patient exprimé directement ou au travers de directives, afin qu’on l’aide à mourir en cas d’aggravation et/ou s’il n’a plus la volonté de vivre ;

‐  La demande exprimée par un proche ou un parent afin que le patient reçoive une aide pour mourir parce qu’il a ou avait évoqué la situation qui prévaut actuellement et souhaitait qu’on ne prolonge pas sa vie dans de telles conditions.

 

Un questionnaire de 110 items, rempli en équipe, permettait de connaître pour chaque patient l’origine de la DeMA (patient, proche, soignant); les caractéristiques du patient, le contexte médical, psychologique et social, la nature des symptômes, le type de démarche palliative, l’évolution clinique du patient et de la DeMA, et l’interprétation de la prise en charge en soins palliatifs par l’équipe.

Le taux de participation a été de 60%; 342 structures ont fourni la description de 783 cas de DeMA survenues durant l’année 2010 (476 émanant de patients, 258 des proches et 49 du personnel infirmier); 132 équipes n’ont pas recensé de DeMA.

 

Un maintien notable des DeMA.

Bien qu’il y ait eu dans 83 % des cas un suivi régulier par une équipe de soins palliatifs, les DeMA ont été maintenues dans 61% des cas (DeMA continue pour 37%, fluctuantes pour 24%)

 

Un profil des patients parfois inattendu.

-          les patients étaient le plus souvent atteints de cancer (72%), 68% se trouvaient en phase terminale de leur maladie et sont décédés dans le mois qui suivait la DeMA.

-          95 % des patients étaient informés de la nature de la maladie incurable et 92% de son pronostic.

-          79% des patients n’ont pas mis en avant une raison physique mais 65 % avaient des difficultés d’alimentation, 54 % des difficultés de déplacement, 49 % des problèmes d’excrétion et 39 % étaient cachectiques ; 31% des patients étaient anxieux ou dépressifs.

-          la douleur incontrôlée était rare (3,7%).

-          il existait des directives anticipées dans seulement 1.8% des cas et une personne de confiance n’avait été désignée à l’avance que dans 5% des cas.

 

La DeMA, issue d’une situation inextricable pour les équipes soignantes.

C’est l’interprétation la plus fréquemment rapportée par l’équipe de soins palliatifs (44%). Un désir réel de ne pas continuer à vivre a été perçu dans 36% de cas et une demande réelle d’aide à mourir dans 30%.

 

Un déficit de prise en charge spécifique en amont.

Pour la majorité des patients (55 %) et bien que la maladie ait été à un stade avancé, la DeMA a été le motif d’un premier recours aux équipes de soins palliatifs, c’est-à-dire qu’il n’y avait pas eu de prise en charge palliative antérieurement.

Cette donnée majeure témoigne d’un déficit critique de la démarche palliative dans les services, et dans le recours aux équipes spécialisés.

 

L’essai interventionnel prévu après l’enquête, qui vise à faire la démonstration de l’impact du recours précoce aux EMASP en cas de DeMA dans les services, nous parait donc d’autant plus pertinent. Nous allons solliciter les équipes en ce sens tout à fait prochainement.

 

 

(*) Ferrand E, Dreyfus JF, Chastrusse M, Ellien F, Lemaire F, Fischler M, for the French DemandE Group. Evolution of requests to hasten death among patients managed by palliative care teams in France : a multicenter cross-sectional survey (DemandE). European Journal of Cancer 2011

NB: afin d’en faciliter la diffusion, une version française de l’article regroupant l’ensemble des résultats sera également soumise à publication.

 

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